Méditation de ce jour – Pierre Sonte, curé
(Isaïe 50, 4-7 ; Ps- 21 (22), 2, 8-9,17-20,22b-24 ; Ph 2,6-11 ; Mt 26, 14-27,66)
Mes Sœurs et Mes Frères,
Après quarante jours de préparation, nous voici au début de la Semaine Sainte en ce dimanche de la passion du Seigneur et des Rameaux.
Les textes de la liturgie insistent sur l’exigence d’une vie de croyant à la suite du Christ. Cette vie n’est pas de tout repos. Elle ne nous évade pas des réalités de notre existence. Nous sommes prévenus.
Dans l’hymne aux Philippiens, l’Apôtre Paul évoque la souffrance du juste : son abaissement et son élévation à cause de son obéissance à sa mission. « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort et la mort de la croix. C’est pourquoi Dieu l’a exalté. »
Dans les épreuves, Jésus a toujours cherché la force auprès du Père. Il nous invite, comme le peuple élu confronté à l’épreuve de l’exil voulant se laisser aller au découragement, à tenir bon, certain que le Seigneur ne nous abandonnera pas.
Quel sens donner à notre épreuve actuelle pour pouvoir la traverser de sorte qu’elle ne nous laisse pas trop de blessures intérieures ?
Selon la façon dont nous la définirons, le sens à lui donner va être déterminant. Si nous appréhendons notre crise actuelle de façon rationnelle, elle peut s’apparenter à un obstacle, une souffrance, une douleur. Dans cette perception, elle est négative et donc vient perturber les plans de notre vie.
En son sens spirituel, elle nous ramène à une réflexion sur nous-même pour nous libérer de notre égo qui nous illusionne sur ce que nous sommes. En ce sens, cette crise devient un processus de libération. Elle nous montre notre vulnérabilité, c’est-à dire qu’elle brise en nous, la tentation de l’arrogance de l’ego, la tentation de la suffisance, la tentation du mépris de ce qui nous entoure. Elle nous invite à regarder le monde différemment.
« Dieu mon Seigneur m’a donné le langage d’un homme qui se laisse instruire, pour que je sache à mon tour réconforter celui qui n’en peut plus »
Devant l’épreuve que nous vivons actuellement, nous devons nous armer intellectuellement pour rester digne. Il nous sied d’avoir une attitude, une conscience sociale à la résistance. Cette épreuve qui fait partie de notre route, a pour chacune et chacun une valeur éducative. Elle est un chemin de la réconciliation avec la nature, avec l’environnement, avec nous-mêmes, avec nos valeurs et nos racines. Elle n’est pas du tout joyeuse avouons-le. Cependant, il se peut que ce que nous détestons, soit une bonne chose pour nous. Il se peut que ce qui nous blesse, fasse partie de notre bonheur. Il se peut que ce qui nous réjouit fasse partie de notre indignité. Nous sommes dans le temps d’une gestation, d’un enfantement. Il nous faut du courage. Quelque chose doit nous animer aujourd’hui, si ce n’est déjà fait. Et cette dernière ne doit pas être seulement rationnelle, parce que la raison n’a jamais eu les moyens ni linguistiques, ni spirituels de dire l’essence des choses. Il nous faut la profondeur du cœur pour nous aider à devenir meilleur au sortir de cette crise. Je ne nous invite pas à vivre l’émotion de l’épreuve, mais de trouver un peu de lumière devant nous. C’est un exercice spirituel qui n’est pas facile et qui demande beaucoup de disciplines. Elle nous contraints à nous recentrer, à méditer en nous remettant à Dieu.
Cette épreuve frères et sœurs, nous allons l’assumer avec humilité, avec patience et courage chacune et chacun à sa manière. Beaucoup de femmes et d’hommes sont très courageux, leur courage n’est pas apparent. Ils ont juste le courage d’eux-mêmes. C’est la vulnérabilité des courageux et le courage des vulnérables. C’est de dire : « bon Dieu, ne nous livre pas à nous-mêmes ne serait- ce que le clignement de notre œil, ne nous laisse pas dévier de la voie. Si tu nous livre à nous-mêmes, nous serons l’expression de notre ultime faiblesse ».
Frères et sœurs, dans les épreuves, la façon dont reviennent à nos mémoires les enseignements de nos parents, disent énormément sur le lien et la valeur qu’ils ont pu avoir dans nos vies. Pensons à eux ! C’est l’épreuve qui rappelle la nature de la qualité du don qui nous a été fait par nos parents. C’est une invitation à ce que la mémoire nous redise ce qu’elle avait oublié. C’est là, qu’on révèle la qualité et l’importance de l’éducation alors que l’esprit du temps nous dit : « gagne vite ton autonomie, deviens adulte et fais ce que tu veux ». La spiritualité de tous les temps nous dit : « tu n’avanceras jamais vers Dieu, vers ta mort, si tu ne sais pas te retrouver avec tes parents, ta mère et ton père ». C’est le moment frères et sœurs, de faire un recourt au passé et d’œuvrer pour que cette épreuve se transforme en expérience pour un avenir meilleur.
Amen !